Alors que le 53ème Congrès se clôt, nous mettons dans le débat contradictoire certains éléments d’analyse. Jamais Unité CGT n’est rentré dans un débat sur les personnes au détriment des choix politiques qu’elles et qu’ils incarnent, comme de la vision du syndicalisme qu’elles et qu’ils défendent. Aussi, nous regrettons que l’ensemble de celles et ceux qui ont pris part au débat n’aient pas eu la même conséquence et dénonçons celles et ceux qui s’offusquent vainement de la violence des débats qu’elles et qu’ils ont tout fait pour étouffer.
Que retenir du Congrès après l’élection de la Commission Exécutive Confédérale, du Bureau confédéral et de Sophie Binet comme SG de la Confédération CGT?
1/ Olivier Mateu, SG de l’UD CGT 13 et Emmanuel Lépine, SG de la FNIC CGT sont écartés par des manœuvres d’un autre âge de la direction confédérale : un message désastreux pour l’ensemble de la classe ouvrière en lutte.
2/ Malgré la remise en cause de la direction sortante par le Congrès et le rejet par le Congrès de plusieurs éléments ultra-nocifs (bilan de la direction et le collectif Plus jamais ça notamment), nous avons assisté à une révolution de palais à la tête de la direction confédérale, en somme, “tout changer pour que rien ne change”
3/ La CGT sort divisée de ce Congrès. L’unité réelle passera par les orientations et le fond politique. UnitéCGT prendra toute sa place dans cette bataille des idées.
4/ S’il n’y a pas de primaires à la CGT, les manœuvres pour empêcher, entre autres, Olivier Mateu, SG de l’UD CGT 13, et Emmanuel Lépine, SG de la FNIC CGT d’intégrer la direction confédérale de la CGT auront révélé la progression du syndicalisme de classe et de masse dans la CGT.
On comptabilisait en effet plus de 205 000 voix (portés par les délégués au Congrès) de syndiqués en faveur du rajout des noms d’Olivier Mateu, Emmanuel Lépine ou encore Stéphane Debon (pour le CNTPEP) sur la liste des membres de la Commission Exécutive Confédérale (CEC).
Insuffisants pour débloquer le verrouillage de la liste, ces scores “hors normes” traduisent, non pas une CGT fracturée en “bloc”, mais bien la vigueur et la force grandissante d’une sensibilité révolutionnaire au sein de toute la CGT qui représente un très gros tiers des délégués au Congrès, et partant, sans doute bien davantage dans toute l’organisation.
Depuis le début, nous avons, davantage que les personnes, mis en avant la bataille des idées, notamment par la Contribution aux débats, le concours au film “Pour une CGT à la hauteur des enjeux”, ou encore la participation aux débats militants organisés dans plus d’une dizaine de villes. Ces idées, qui se sont incarnées durant ce Congrès en particulier sur la candidature d’Olivier Mateu, ont progressé. Un rapide coup d’œil dans le rétroviseur le confirme.
Quelques éléments d’analyse:
Le 53e Congrès de la CGT a rejeté le rapport d’activité de la direction sortante. À travers ce vote la majorité des congressistes a refusé de valider le bilan de ces dernières années et plus globalement l’accélération du recentrage de la CGT depuis les années 90.
Une telle décision est historique et prouve que le fossé grandissant, entre les bases syndicales et la confédération, était bel et bien une réalité. Parmi les nombreuses interventions qui ont incarné cette volonté de rupture avec une méthode verticale et autoritaire, celle de Murielle Morand de la fédération des industries chimiques s’adressant directement à Philippe Martinez pour lui demander qui lui avait donné mandat pour parler de médiation alors que « les travailleurs sont dans la rue ». Ce qui a été rejeté c’est bien d’une part la dérive réformiste de la direction confédérale et le verrouillage bureaucratique qui va de pair.
Le Congrès a ainsi, dans les faits, réaffirmé que l’outil confédéral appartient d’abord, avant tout et seulement aux syndicats, à leurs syndiquées et syndiqués, qu’il s’agit là d’un outil bâti pour la lutte et non pour commenter – en observateur extérieur à coup de communiqué – les luttes sociales. L’outil confédéral est le levier essentiel à la convergence des colères et à la confédéralisation de toutes les luttes menées par l’ensemble des secteurs professionnels.
La décision de sortir du collectif Plus Jamais ça, accompagnés par de virulentes critiques, tant dans le fond que la forme, a également donné raison à celles et ceux qui ont toujours été en opposition avec le Collectif plus jamais ça, puisque le Congrès a clairement exprimé et son refus du collectif plus jamais ça et son exigence du respect de la démocratie syndicale.
Une deuxième fois au sujet de la recomposition syndicale. Là encore les congressistes ont gagné une clarification au sein de la commission et dans les débats en salle sur cette stratégie. En l’état, les discussions avec d’autres organisations syndicales, notamment la FSU et Solidaires, n’étant pas discutées au sein des syndicats, cette recomposition n’aura pas lieu.
Par ses délibérations, ce congrès inédit et historique a montré que la majorité des syndicats CGT ont envoyé des délégués qui ont mis en échec les projets et orientations de la direction sortante. Toutefois, des questions de fond – stratégiques – pour notre organisation n’ont pas été traitées.
Si certaines et certains voudraient faire croire que le vote du document d’orientation a effacé le rejet du document d’orientation, par ces interventions et ces votes les congressistes ont pris position contre ces choix d’orientation si structurants pour l’activité de la CGT.
Il est également primordial de rappeler qu’une minorité d’amendements a pu être défendue, et on ne peut que regretter que ceux concernant le nouveau statut du travailleur salarié n’aient pas été suffisamment discutés, alors que cette orientation est au cœur du recentrage réformiste de la CGT. Un autre sujet majeur n’a pas été discuté : la place des privés d’emploi dans la CGT, la place du Comité national des travailleurs privés d’emploi et précaires (CNTPEP) en tant qu’organisation souveraine pleinement reconnue au sein de la CGT.
De même, les congressistes ont à plusieurs reprises formulé le désir que l’ensemble des syndicats se saisissent des questions liées aux relations internationales, notamment le débat FSM/CSI-CES, en vue du 54ème Congrès. La prochaine direction confédérale se doit de favoriser les conditions nécessaires pour que ce débat ait lieu dans l’organisation.
Le rejet du rapport d’activité aurait dû amener à cette discussion essentielle au regard des valeurs démocratiques de notre organisation syndicale.
Et maintenant?
Le CCN a bataillé contre la CEC sortante et s’est même imposé à la nouvelle CEC élue. S’il est évident que les choix exprimés par la majorité des congressistes ont favorisé ce rééquilibrage entre la CEC et le CCN, il faudra espérer que ce temps du congrès ne soit pas qu’une simple parenthèse mais bien le début d’une volonté de faire commun dans la CGT !
Le Bureau confédéral sera observé. Malgré un plébiscite des congressistes pour déjouer les manœuvres de la direction sortante, les dirigeants de l’UD CGT 13 et de la FNIC CGT se trouvent exclus de la direction confédérale. Les 205 000 voix portées sur les candidatures d’Olivier Mateu et Emmanuel Lépine (36% des voix des congressistes) ont prouvé que nos idées, qui s’incarnent dans un syndicalisme CGT offensif, de classe et de masse, prévalent largement, si ce n’est majoritairement, dans la CGT. Dans ces conditions, rassembler ne peut pas être une incantation creuse, il faut le vouloir. Cette unité suppose donc des actes forts de la nouvelle direction.
La volonté réaffirmée par les congressistes de renouer avec un syndicalisme CGT de classe et de masse assumant sa portée révolutionnaire, doit se concrétiser dans la construction confédéralisée des luttes à commencer par celle des retraites, dans la mise en place de campagnes nationales de défense et de reconquête de l’outil industriel, de défense et de développement des services publics, de défense et d’extension des droits sociaux et syndicaux notamment ceux garantis par la Sécurité sociale.
Cette volonté doit également s’illustrer par l’articulation de l’ensemble de nos revendications avec la nécessaire rupture révolutionnaire avec la société capitaliste qui condamne l’avenir du genre humain. Seule l’abolition du salariat et du patronat, par la socialisation des grands moyens de production et d’échange, permettra de réconcilier l’humanité et son environnement.
Là où il y a une volonté il y a un chemin, faut-il encore la volonté de le trouver. Rappelons également que de très nombreux points fondamentaux n’ont pas été abordés et donc tranchés par le Congrès. Là encore, la bataille des idées devra se poursuivre. UnitéCGT répond et répondra présent!